Pierre-Olivier Gourinchas est professeur d’économie à Berkeley en Californie. Il nous livre son témoignage sur la recherche et l’enseignement aux Etats-Unis illustré par son parcours au sein des plus prestigieuses universités américaines.
Pourquoi avez-vous souhaité vivre aux Etats-Unis ?
Je suis parti pour faire ma thèse en 1992. Mon directeur de DEA m’a beaucoup encouragé en disant que si je souhaitais faire une carrière dans la recherche, je devais passer par les Etats-Unis.
Comment pose t-on sa candidature à un programme doctoral aux Etats-Unis ?
C’est un processus standardisé dans lequel il faut envoyer un dossier de candidature. Les lettres de recommandation sont très importantes car il est difficile de connaître le niveau et la qualité des différentes formations dans tous les pays du monde. On sait par exemple que les étudiants venant de telles ou telles formations marchent bien mais on ne peut pas connaître tous les systèmes d’éducation. J’ai été admis au MIT qui était mon 1er choix.
Pourquoi avez-vous décidé de rester aux Etats-Unis ?
J’ai suivi un programme doctoral de 4 ans. Quand on part, on ne part pas avec l’idée de rester pour la vie. Je me suis aperçu sur le terrain qu’il y avait beaucoup de mobilité, d’échanges dans le domaine académique. J’ai pu trouver un poste de assistant professor of economics à Stanford. J’ai rejoint ensuite une équipe de macro-économistes avec Ben Bernanke, l’actuel président de la Réserve Fédérale américaine.
Vous avez ensuite été à Berkeley ?
Ma femme a été embauchée à Berkeley et j’ai eu également une opportunité donc on est parti en Californie.
Comment s’organisent vos journées ?
La charge d’enseignement est assez légère pour les undergraduate.
La partie d’enseignement pour les étudiants en thèse se compose de cours et de travaux de recherche avec des discussions avec les étudiants qui alimentent aussi notre propre recherche.
La recherche représente 70% de mon temps.
Envisagez-vous de rester aux Etats-Unis ?
C’est un pays extraordinaire mais mon pays reste la France. Il y aura peut-être un retour mais ce n’est pas facile de mettre en place un retour professionnel.
Que pensez-vous de la recherche en France et de la mise en place du plateau de Saclay avec un pôle recherche développé?
i cela permet d’accroître les moyens de recherche, c’est très bien. En assurant le financement, la visibilité et en faisant venir des capitaux privés, c’est la clé pour attirer les chercheurs. Mais le diable est dans les détails.
Pour ce qui est de la recherche en France vue des USA, ce qui frappe c’est le morcellement de la recherche en France et son cloisonnement.
Pour ce qui est de la recherche au niveau européen, il y a eu beaucoup de progrès avec la mise en place de financement par la commission européenne. Les frontières s’estompent en Europe dans le domaine de la recherche en économie.
Quelles sont les plus grandes difficultés que vous avez rencontrées aux Etats-Unis ?
Le contrat social qui n’est pas parfaitement rédigé. C’est un des pays les plus avancés dans le monde avec un système de santé rétrograde. C’est une source d’étonnement et ce n’est pas compréhensible. La réforme sur la santé d’Obama est a minima et très loin de la couverture universelle. Il y a un conflit entre générations sur ce sujet.
Je fais partie de ceux qui sont bien lotis avec des bons revenus. Les choses sont simples dans ce pays tant qu’on n’est pas confronté à un problème professionnel par exemple.
Quels conseils donneriez-vous à des étudiants français ?
C’est une opportunité extraordinaire que de venir aux Etats-Unis. A Berkeley, nous prenons 20 à 25 étudiants par an sur 500 candidatures du monde entier. Il faut bien se préparer. Je conseille de commencer à faire un master en économie pour côtoyer des chercheurs en économie ayant déjà une renommée en France ou Europe dans l’idée de pouvoir être recommandé par ses professeurs pour sa candidature.