Nous avons eu la chance de rencontrer Isabelle Guglielmi, docteur en pharmacie et créatrice du site Ameriksanté. Elle nous livre ses impressions sur sa vie aux Etats-Unis.
1. Pourquoi avez-vous souhaité vivre aux Etats-Unis ?
Nous avions déjà été expatriés plusieurs fois : nous avions habité au Maroc et à Taiwan et pour nous, il était évident que nous allions repartir. Il avait été question de Singapour, puis, une opportunité s’est présentée pour partir aux Etats-Unis : mon mari avait un poste dans son entreprise dans la Silicon Valley, non loin de San Francisco. Alors nous avons foncé. Par la suite, en 2011, green card en poche, mon mari a eu une belle opportunité de travail à Kansas City et donc, nous avons décidé de partir et vivre cette nouvelle aventure. Nous avons découvert là une autre Amérique.
2. Quel a été votre parcours professionnel depuis votre arrivée ? Qu’est-ce qui vous a conduit dans cette voie plutôt qu’une autre?
Alors, en arrivant, je devais pour travailler demander une autorisation de travail que je pouvais demander vu mon visa L2. Mais la solution professionnelle n’était pas facile à mettre en œuvre : trouver un travail dans une autre langue, dans mon domaine et en même temps un mode de garde pour mon petit bonhomme de 2 ans. J’étais pharmacienne dans l’industrie pas vraiment le domaine phare dans la Silicon Valley.
Je me suis dans un premier temps investie dans l’association des parents d’élèves de l’école française dans laquelle mes enfants allaient, Mais très vite, j’ai commencé à me dire que j’avais besoin d’autre chose, surtout que notre expatriation allait s’arrêter et que nous étions de nouveau sur le point de déménager. Dans la Baie de San Francisco, j’avais vu beaucoup de femmes, soit travailler, soit créer quelque chose : l’esprit entreprenariat est très fort là. J’ai donc décidé de monter ma propre structure, de mettre à profit mes compétences, ne pouvant pas en plus avoir rapidement d’équivalence de diplôme. J’ai donc créé un site Santé dédié entièrement aux Francophones résidant aux Etats-Unis : il s’appelle AmerikSanté
3. Si vous étiez resté en France, pensez-vous que votre carrière aurait été différente ?
Oui, c’est clair, je n’aurais pas été amenée à me remettre en question de la sorte. D’une certaine façon, je l’aurais fait : j’avais dans l’intention de faire un bilan de compétence et me rediriger vers l’industrie dans des métiers plus marketing. Mais je me serais dirigée vers le salariat, c’est sur.
4. Qu’est-ce qui vous a surpris le plus à votre arrivée aux Etats-Unis?
Ayant habité au départ dans la Baie de San Francisco, puis là, où je suis dans le Midwest, j’ai été confrontée à deux Amérique. Très différentes dans la manière d’aborder le monde et la vie, mais leur point commun (et il y en a plus d’un), c’est la joie de vivre et l’optimisme qui se dégagent des américains. C’est un point qui marquent tous les gens qui arrivent vivre aux Etats-Unis, je pense.
5. Qu’appréciez-vous le plus ?
Justement, ce que j’apprécie le plus, c’est la bonne humeur et l’optimisme et d’être toujours accueilli avec plaisir, de pouvoir discuter avec n’importe qui, même si cela ne va pas très loin : cela contribue à se sentir à l’aise partout.
6. Quelles sont les plus grandes difficultés que vous avez rencontrées dans ce pays?
Notre plus grande difficulté paradoxalement a été de nous intégrer. Lorsque l’on vit à San Francisco, on a tendance à vivre entre français, parce-qu’il y en a partout et que les relations sont plus faciles : on se comprend tout de suite, on a les mêmes codes, on se retrouve sur plein de plans. Arriver ailleurs et se retrouver dans un environnement totalement américain est un autre challenge. Et même si je me sens totalement à l’aise maintenant, j’ai toujours un peu de mal à lier connaissance et à aller au delà d’un simple échange de banalités : même si ils sont très sympa, cela ne va pas plus loin. Pour se faire des amis américains, il faut se retrouver sur un intérêt commun et là on brise la glace et on arrivera à aller au delà de la simple conversation. Les intérêts communs pourront être : aller à la même église, faire partie de la même association de parents. Les américains sont très impliqués dans des associations, ils donnent beaucoup de leur temps à servir des causes et ils sont souvent très très occupés, surtout quand ils ont des enfants. Du coup, cela reste le seul moyen d’arriver à les accrocher et à créer des amitiés.
7. Quelle est votre anecdote préférée sur votre expérience aux us ?
J’en ai plein : des conversations saisies, des gestes de gentillesse touchants. Sur un parking de supermarché, quand j’avais fait tomber car cela m’avait échapé des mains un pack de bouteilles d’eau, et que le gars chargé des caddies, m’a entendu et est venu me prendre le pack pour aller m’en chercher un autre : ce jour-là, je suis restée complétement scotché par tant de gentillesse.
Dans un autre domaine, le jour, où nous nous sommes retrouvés coincé à un concert à moitié dehors, alors qu’il y avait une alerte tornade avec les sirènes hurlantes : ce jour-là, nous avons eu très peur …
8. Quelle est votre plus grande fierté ?
Je pense qu’on peut le dire : notre plus grande fierté a été de devenir à notre tour américain. Après 5 ans de green card, nous avons demandé la nationalité : un processus très simple à ce stade-là. C’était émouvant et le jour de la cérémonie d’allégeance, j’étais un peu chamboulée, je ne voulais plus y aller. Et puis finalement, cela a été une très belle cérémonie. Nous avons été félicité par tous les gens auxquels nous l’avons dit.
Sinon, la plus grande fierté est de voir comment nos enfants sont si bien intégrés dans leurs écoles respectives et de les voir s’épanouir dans cette culture différente de la nôtre.
9. Un conseil pour les Français qui souhaiteraient s’installer aux Etats-Unis ?
Arrêter de rêver et de croire que la vie est plus facile aux US et que cela réglera tous les problèmes. La vie aux US n’est pas si facile que cela : tout est très cher, on n’est pas forcément accueilli à bras ouvert : c’est une société à la fois très individualiste, très élitiste aussi et parfois à deux vitesses. C’est très contrasté. On ne peut pas la prendre de la même façon qu’en France : ici il faut se prendre en charge car personne ne le fera à votre place : ne pas se plaindre et ne compter que sur soi même.
On est aussi parfois confronté à des opinions ou croyances très fortes de la part de gens assez proches (les voisins), il faut savoir composer, ne pas être choqués et surtout ne pas juger.