Un chef gastronome venu de France est devenu un vrai businessman avec près de 500 employés et plusieurs restaurants…Nous l’avons rencontré pour en savoir plus sur les spécificités de la grande gastronomie aux Etats-Unis, mère patrie des fast-foods…
Pourquoi avez-vous souhaité vivre aux Etats-Unis ?
En fait, j’étais chef à l’Auberge de l’Ill en Alsace et on m’a demandé de réouvrir le restaurant Maxim’s à Chicago. Je suis arrivé en 1985 à 35 ans.
Quel a été votre parcours là-bas ?
J’ai connu une très bonne presse quand j’étais au Maxim’s. J’ai ouvert l’Everest en 1986. Au début, c’était un club privé et puis on a ouvert le soir au public. L’Everest a été élu meilleur restaurant de l’année et je me suis fait un nom très vite. Pendant 3 ans, je n’ai fait que ça.
En 1990, j’ai ouvert la Corner Bakery pour faire de la boulangerie artisanale. Cela a tout de suite pris. On nous a contacté pour une franchise et j’ai vendu.
J’ai ensuite ouvert une brasserie, la brasserie Jo à Chicago et ensuite une autre à Boston. Puis il y a 3 ans, j’ai ouvert la Tour Eiffel dans le casino Paris Las Vegas.
Cela représente combien d’employés ?
Environ 500 employés pour la Tour Eiffel, l’Everest et les brasseries Jo.
Aujourd’hui comment répartissez-vous votre temps entre tous vos restaurants ?
Je passe 80% de mon temps à l’Everest sauf quand il y a une ouverture de restaurant où il faut, un mois avant l’ouverture, consacrer beaucoup plus de temps. L’Everest reste ma « boutique » pour créer.
En quoi la gestion d’un restaurant est particulière aux Etats-Unis ?
Aux Etats-Unis, tout est plus grand. On fait un grand nombre de couverts. Ce n’est pas suffisant de bien faire la cuisine, les marges sont plus petites, il faut savoir gérer. Ici ce n’est pas possible d’avoir un restaurant qui n’est pas remboursé en 3 ou 5 ans. Vous n’êtes jamais seul propriétaire de votre restaurant comme en France, il y a toujours plusieurs partenaires.
Quel est votre emploi du temps type?
Je commence mes journées à 9h00, parfois plus tôt quand je suis à Las Vegas et je les finis à minuit. Les employés travaillent beaucoup plus qu’en France. Pour la petite main d’œuvre, ils ont tous deux emplois en faisant 70-80 heures par semaine. Les cadres, eux, font minimum 70 heures par semaine.
Les horaires pour un repas gastronomique aux US différent beaucoup de ceux que nous connaissons en France?
A l’Everest, nous travaillons en service continu de 17h30 à 22h00. Beaucoup de gens viennent dîner vers 17h30 avant le théâtre…
Qu’appréciez-vous aux Etats-Unis ?
J’aime le challenge, j’aime avancer. Ici on arrive à avancer, on a les moyens pour le faire. L’Américain mange beaucoup plus à l’extérieur qu’en France sauf pour les jours de fête comme Thanksgiving ou Noël. Il invite au restaurant plutôt qu’à la maison. Il travaille tellement qu’il a moins de temps pour se concentrer à la maison.
Aussi, c’est un grand pays où l’on trouve des qualités de marchandise bien supérieures en toute saison.
Qu’est-ce que vous détestez ?
Les gens qui mangent dans leur voiture. Le téléphone portable à table, c’est interdit à l’Everest. L’Américain qui mange partout, devant la télévision.
Quelle est votre devise ? « What is good today, is not good enough tomorrow ». Il faut faire mieux demain que ce qu’on a fait aujourd’hui.
Quels conseils donneriez-vous aux Français qui s’installent ?
Beaucoup de gens qui viennent d’Europe n’ont pas assez d’expérience du métier, donc ils repartent vite sans faire grand chose. Il faut apprendre le métier avant d’arriver et la langue.
Si vous deviez rentrer en France, qu’est-ce qui vous manquerait des US ?
Je me suis fait beaucoup d’amis dans la grande restauration, mes amis me manqueraient. J’ai l’habitude que tout soit grand : les appartements, les parkings, les banquets (un petit mariage ici, c’est 100 personnes)…etc. Tout marche ici 24h/24 et 7j/7 sans coupure entre 12h00 et 14h00. Je suis ici depuis 1985, on s’adapte au pays et on s’américanise.