EuropUSA a interviewé Jean-Marie Mauclet, artiste aux Etats-Unis.
Découvrez son extraordinaire parcours aux USA, aussi professionnel qu’engagé.
Pourquoi avez-vous souhaité vivre aux Etats-Unis ?
Pour des raisons d’orientation. Je voulais partir faire mes études aux Etats-Unis, des études de théorie politique. Parce qu’en France le système est tel qu’il est très difficile de se réorienter en cours d’étude. Alors qu’aux Etats-Unis cela est beaucoup plus facile. Après avoir fait des études d’art, j’ai voulu me réorienter vers les sciences politiques, ce que j’ai eu l’occasion de pouvoir faire ici.
Comment s’est déroulée votre arrivée aux Etats-Unis ? Quel a été votre parcours ?
Je me suis marié aux Etats-Unis, et j’ai été très bien accueilli par ma belle-famille. Par la suite je suis revenu en France, où j’ai enseigné aux Beaux Arts. Je suis retourné en Amérique du Nord quelques années plus tard, plus précisément au Canada, avec ma deuxième femme Gwylenee Gallimard, elle-même artiste. Enfin, du Canada je suis revenu aux Etats-Unis.
A notre retour aux Etats-Unis, nous ne voulions plus faire d’art dit commercial. Nous voulions faire de l’art, sans pour autant en dépendre pour vivre. C’est pourquoi nous avons mis en place un projet conceptuel : Un petit café Français. Nous avons en effet ouvert un café qui fait la synthèse entre le fast food et la cuisine française. C’est un lieu d’accueil, entre deux cultures, peu cher. Après une vingtaine d’année, nous avons vendu le café à nos salariés et nous nous sommes remis à faire de l’art à plein temps. Les démarches pour monter notre café ont été compliquées et très formalisées.
Comment la situation a-t-elle évolué? Quels sont vos projets actuels?
Aujourd’hui, nous travaillons surtout autour de la thématique « art et communauté », notre art est teinté d’idéologie politique et sociale. Pour vous donner un exemple, depuis trois mois nous travaillons avec différentes communautés, notamment des écoles, des associations locales, des universités etc. Ces différents groupes collaborent pour monter un projet artistique, ma femme et moi sommes là pour leur donner des clés et des outils de travail et c’est ensuite à eux de participer ensemble à la construction de l’œuvre. C’est une initiative du Musée des Arts du Mississipi qui a construit le projet « C3 », qui fait référence à la communication, la conversation et la créativité.
Nous avons aussi des activités autour de débats politiques et autour de l’histoire de la région.
En tant que Français, comment les Américains perçoivent votre implication sociale, artistique et politique ?
Ici, les personnes sont ouvertes. En tant que Français j’apporte un plus, un regard extérieur, j’écoute. Lorsque vous vivez à l’étranger il faut savoir remettre en cause sa propre culture.
Quelles sont les plus grandes difficultés que vous avez rencontrées aux Etats-Unis ?
Lorsque je suis arrivé la première fois en tant qu’étudiant ma plus grande difficulté a été la langue, je ne parlais pas beaucoup anglais. C’est pourquoi j’ai du venir trois mois avant le début des cours pour prendre des cours intensifs d’anglais. En ce qui concerne mon insertion dans la société américaine, cela n’a pas été difficile, puisque ma belle famille m’a chaleureusement accueilli. Les Américains aiment bien les étrangers.
Retournez vous parfois en France ? Quelles en sont vos impressions ?
Nous retournons en France tous les ans. On sent un énorme décalage, les Etats-Unis se détachent peu à peu de leurs racines européennes. Et puis aujourd’hui nous sommes tous les deux Américains et d’une certaine façon nous sommes déracinés. Malgré tout je ressens une certaine nostalgie envers la France. Mais nous ne pouvons partir, étant donné que tout notre réseau est ici et pour notre activité professionnelle il est essentiel.
En parlant de votre réseau, cela a-t-il été difficile de le mettre en place ?
Notre domaine d’activité est très ciblé, donc ça a été facile de s’insérer professionnellement. C’est surtout Gwylenee qui s’occupe de l’aspect relationnel. Nous avons établi notre réputation grâce à l’activité du restaurant. Il était source de rencontres et de liens sociaux. Ici, il faut être très ouvert, il faut venir sans préjugés, surtout parce que l’art doit correspondre à l’attente des gens. Nous avons d’ailleurs des activités très variées. Les Etats-Unis demandent beaucoup de travail, de talent, de souplesse. C’est pourquoi je fais de l’art, j’ai monté mon café français, je construis aussi du mobilier, j’ai des activités politiques et sociales etc. Il vaut mieux avoir plusieurs cordes à son arc, pour pouvoir mieux rebondir après.
Quelle est votre grande fierté ?
Lorsque nous avons ouvert notre petit café français, nous avons assuré à plein temps nos salariés pour qu’ils puissent avoir une couverture santé, ce qui suppose un coût important aux Etats-Unis. Aujourd’hui le café appartient à deux de nos anciennes salariées. Pour nous c’est une grande fierté.